Ateliers à la maison d'arrêt de Villepinte
Tout au long de la saison 2021-2022 et en partenariat avec le SPIP de Seine-Saint-Denis, l’Académie Fratellini a proposé un cycle d’ateliers à une quinzaine de jeunes majeurs détenus à la maison d’arrêt de Villepinte (93). Les ateliers se sont répartis sur 2 temps forts : septembre-octobre 2021 dans un premier temps, mai-juin 2022 dans un second temps.
A l’issue de la 1ère session d’ateliers, le 13 octobre 2021, les participants ont pu restituer leurs apprentissages devant un public de la maison d’arrêt (personnel de la maison d’arrêt et autres détenus).
Jean-Louis Galli, Isabel Serna Roche et Gustavo Anduiza, intervenant·es cirque habitué·es des ateliers en maison d’arrêt, reviennent sur le déroulement du projet, la manière dont ils·elles ont perçu l’évolution des détenus au fil des séances et les bénéfices, notamment sur le collectif et le vivre-ensemble, de la pratique du cirque :
"Les premières séances ont bénéficié d’une curiosité saine mais aussi d’attitudes goguenardes teintées d’ironie parce que le cirque véhicule des représentations souvent contradictoires, parfois fantasmées à l’image des expressions populaires comme “C’est quoi ce cirque” ou “On n’est pas des clowns”.
Nous nous sommes appuyé·es sur une pédagogie de découverte solide et éprouvée avec l’aide du matériel pédagogique, nombreux et varié, fourni par l’Académie Fratellini.
Très rapidement, la pratique pédagogique, l’effort d’acquisition et de répétition, la concentration vers la réussite ont succédé à l’étonnement des prémices. Les six premières séances ont été pour le groupe une plongée immersive dans l’univers du spectacle parsemé d’anecdotes, d’échanges d’expériences, de progrès partagés, de rencontres (avec les trois intervenants, avec l’équipe audiovisuelle de la maison d'arrêt) et d’exploits circassiens réalisés.
Dès la sixième séance, nous bâtissons progressivement une évolution collective avec des tapis-valise légers et maniables qui nous permettent de lancer, échanger, jouer, jongler, sauter dans un ensemble joyeux et exigeant. C'est le fil rouge et le premier acte de notre spectacle de fin de projet.
La pratique des arts du cirque est un apprentissage du vivre-ensemble et nous portons ses valeurs indissociables de la pratique : le respect de soi et des autres, de l’espace, du matériel, le courage, l’entraide, la bienveillance, la patience et l’humilité.
Les disciplines du cirque sont extraordinairement variées. Elles participent au développement du corps, de la personne et de son imaginaire. Leurs pratiques augmentent les capacités physiques, techniques et artistiques. La créativité et les qualités des élèves sont sollicitées sous de nombreux aspects lors de l’apprentissage.
Le cirque, média artistique protéiforme offre ensuite sa palette d’agrès : jonglerie (balles, massues, foulards, anneaux), équilibre sur objets (monocycle, échasses, échelle, rouleaux américains) équilibre du corps, portées acrobatiques, théâtre du geste et du mouvement.
La pratique du cirque demande de l’adaptation et la développe. Chaque participant·e peut évoluer, se rencontrer lui-elle-même dans un autre contexte. Le projet permet d’aller beaucoup plus loin qu’une simple découverte et offre la possibilité d’apprendre et de changer le regard que chacun·e porte sur lui-elle-même autant que celui que chacun·e pose sur les autres.
Le volet créativité et imaginaire est abordé tout au long de l’apprentissage par les improvisations, par les exercices de jeu et de mise en scène lors de la création et l’écriture des numéros. Le spectacle final permet de valoriser les acquis et les réussites individuelles ou collectives par le prisme du regard extérieur et public."
Ils·elles reviennent également sur les discussions avec les détenus ouvertes par la restitution en public :
"Le bilan informel et oral du groupe après le spectacle du 13 octobre a également mis en lumière les changements et bouleversements individuels des participants quant à l’intérêt d’une telle action circassienne. Les a priori ont évolué, l’ouverture d’esprit sur les actions culturelles s’est affinée, le plaisir et la fierté engendrés par ce projet sont omniprésents."
Ce projet a été financé par l’appel à projets « Culture et justice » du Ministère de la Culture, via la DRAC Ile-de-France.